Au Niger, on récupère les terres dégradées

 Pour respirer, il faut de l’oxygène ; manger requiert également des terres viables et cultivables. Dans ce contexte de changement climatique, la terre revêt un intérêt capital pour l’Homme. Ce 17…
Au Niger, on récupère les terres dégradées
Site de récupération de terre de Darey, commune de Tondikiwindi, département de Ouallam / CC- Faride Boureima / Studio Kalangou

 Pour respirer, il faut de l’oxygène ; manger requiert également des terres viables et cultivables. Dans ce contexte de changement climatique, la terre revêt un intérêt capital pour l’Homme. Ce 17 juin, partout sur la planète on célèbre la Journée mondiale de lutte contre désertification et la sècheresse. Cette année, c’est « Restauration. Terre. Reprise ».

L’objectif est non seulement de sensibiliser l’opinion publique sur cette question mais également de faire ressortir qu’investir dans des terres saines pour un relèvement plus écologique est une résolution économiquement judicieuse.

La restauration des terres au Niger 

La restauration des terres dégradées facilite la résilience économique, crée des emplois, augmente les revenus des populations ainsi que la sécurité alimentaire. C’est aussi une manière de sauvegarder la biodiversité, tout en permettant de capter le carbone atmosphérique, source du réchauffement de notre planète.

Koné Béri, village situé à une quinzaine de kilomètre au nord de Niamey, figure parmi les premières localités nigériennes ayant bénéficié des crédits carbones grâce à la plantation d’acacias du Sénégal pour piéger les émissions de gaz à effet de serre.

La séquestration du carbone fait partie intégrante des programmes de reboisement du Niger. Avec des plantations en blocs, des brises vent, des haies vives, bonnes pratiques agroforestières, les actions de restauration naturelle assistée « permettront de séquestrer au moins 292 000 tonnes de carbone dans le sol et/ou la biomasse ». Cette multitude de mesures d’adaptation sont en adéquation avec les dispositions des conventions post Rio ratifié par le Niger.

Chaque année près de 100 000 hectares de terres agricoles sont récupérées au Niger, ce qui place le pays en première ligne de lutte face aux changements climatiques. Aussi, dans le cadre de la sécurité alimentaire, ce pays d’Afrique subsaharien vise d’ici 2030 la restauration de 3,2 millions d’hectares de terres dégradées. Dans le document cadre de politique nationale de décentralisation (DCPND), l’environnement fait partie des services transférés aux communes et les actions en matière de NDT doivent être intégrées dans les PDC communaux.

Ce cadre préconise l’application de l’ensemble des techniques du cadre stratégique de gestion durable des terres (CS-GDT) « sur dix ans pour la période 2020- 2030 ».

Pour cela :

– la restauration de 1 030 000 ha terres agro-sylvo-pastorales, la régénération naturelle assistée sur1 100 000 ha,

– la fixation des dunes sur 550 000 ha, l’aménagement des forêts naturelles sur 2 220 000 ha,

– la création de 145 000 kms de haies-vives,

– la plantation d’espèces à usages multiples sur 750 000 ha,

– les plantations de Moringa oleifera sur 125 000 ha,

– l’ensemencement des parcours sur 304 500 ha et la promotion de la foresterie privée sur 75 000 ha.

La CS-GDT dans son plan d’investissement 2015-2029 prévoie, « la réalisation de 75 000 ha par an de récupération des terres dégradées, 20 000 ha de fixation de dunes, 10 millions de plants à produire, 120 000 ha de plantations, 75 000 ha de RNA et de 25 000 de nouveaux aménagements forestiers chaque année » ; cela sur la période 2016-2029,

Selon, le directeur adjoint de la gestion des terres durables, le Colonel Assouman Garba, en 2020, sur 68 750 ha de terres à récupérer, « 46 814 ha sont réalisés » pour « un taux de réalisation physique de 68% ».

Situation des réalisations de la gestion durable des terres 2011 à  2020

Activité Réalisation (ha) Hj Emplois verts crées (pendant 6 mois) Revenus distribué à la population (FCFA) *1000
Traitement des terres dégradées 408759 19620432 148640 58861296
Fixation des dunes 36999 3199950 24242 9599850
Production des plants 77064801 1926620 14596 7706480,1
Plantation 214493 1678407 12715 6713630,9
Lutte contre les plantes envahissantes terrestres 57112 1142240 8653 2284480
Régénération Naturelle Assistée 384698 1538792 11657 2308188

Les techniques

Selon, le directeur adjoint de la gestion des terres durables, le Colonel Assouman Garba, les techniques de récupérations des terres les plus utilisées au Niger sont :

Les demi-lunes agricoles, sylvo pastorales et pastorales :

-La régénération naturelle assistée (RNA

– La fixation des dunes

– Les zai;

– Les bandes pare-feu

– Le muret de pierres sèches

– La banquette classique

– Les cordons pierreux

– La lutte contre les plantes envahissantes terrestres.

Pour le colonel « la restauration des terres dégradées est un des moyens pour parvenir à la sécurité alimentaire en agissant sur les facteurs de dégradation des terres qui sont principalement d’ordre climatique et anthropique ». Ces techniques ont permis « l’amélioration de la fertilité des sols ; l’augmentation de la production agricole ; l’augmentation des revenus des populations de sa zone d’intervention; la régénération des ressources naturelles, base de la production agro-pastorale; l’augmentation de la disponibilité en fourrage ».

La société civile nigérienne n’est pas en reste dans cette lutte. Selon Issa Garba, responsable du réseau des jeunes nigériens sur le changement climatique, sa structure forme « les agriculteurs surtout les jeunes en ce qui concerne la pratique de l’agroforesterie ». Ils mettent l’accent également sur « les questions de régénérations naturelles assistées » ainsi qu’un accompagnement des « femmes pour développer des pépinières » afin qu’elles puissent continuer les actions de développement.

A Yowaré, la restauration des terres est bénéfique aux agriculteurs de cette localité située à une dizaine de kilomètre à l’ouest de la capitale. « Nous profitons beaucoup de ces banquettes car si nous labourons ces banquettes puis semons dedans nous récoltons assez de céréales » a témoigné un habitant de Yowaré.

C’est après les sécheresses des années 1970 que le Niger a commencé à donner plus d’importance au développement durable et à la préservation de l’environnement. Le Niger s’est « évertué à entreprendre plusieurs types de mesures visant l’amélioration du potentiel productif et la préservation de l’environnement qui sont inscrites dans les différents plans quinquennaux et a lancé l’opération « Sahel vert ».

La lutte contre la désertification ne devient évidente qu’en 1995 avec le lancement du processus d’élaboration du Plan national de l’Environnement pour un développement durable (PNEDD). Un plan validé lors du forum national organisé à cet effet en avril 1998.

Faride BOUREIMA.