Dans la ville de Niamey, la question des inondations reste préoccupante et toujours d’actualité. Malgré l’existence des différentes digues de protection pour éviter les dégâts que peuvent causer les inondations, les populations riveraines du fleuve Niger continuent toujours de vivre dans un état de désolation.
A la date du 20 septembre 2019, le bilan des inondations au Niger fait ressortir 211 366 personnes impactées, 16 375 maisons effondrées et 57 personnes décédées suite aux inondations des eaux de pluie, selon le Ministère de l’Action Humanitaire et la Direction de la Protection Civile.
Outre les menaces des inondations des eaux des pluies ou sur les endroits des crues du fleuve, il existe à Niamey des zones appelées quartiers à risque dont Sonuci, Dar es salam, Foulan Koira, Bobiel…etc où la population vit 12 mois sur 12 dans la menace de l’eau. Des eaux usées et stagnantes un peu partout, des maisons envahies par les eaux et même abandonnées.
Le cas du quartier Koira Kano Nord Sonuci est un exemple parmi tant d’autres. Sonuci est une zone qui se trouve principalement dans le lit de Gountou-Yena, qui est un ancien cours d’eau. En effet Sonuci est un espace où l’on peut avoir de l’eau à partir d’un mètre de profondeur, à certains endroits. « A part les eaux des pluies, on constate que l’eau jaillit du sous-sol. Cette situation est due à la remontée de la nappe phréatique, qui n’est pas sans conséquences sur les aspects environnementaux, sanitaires et économiques » selon Allassane Ado Halidou, doctorant en Hydrologie à l’Université Abdou Moumouni de Niamey.
D’après ses explications « le changement climatique fait que certaines villes subsahariennes comme Niamey connaissent une croissance démographique et une extension urbaine rapide liées à la récurrence des inondations » indique-t-il. Le doctorant en Hydrologie ajoute que « les quartiers Sonuci, Dar es salam, Foulan Koira, Bobiel…etc sont des secteurs qui sont inondés 12 mois sur 12. L’eau y réside toute l’année. Ces quartiers sont des bras de la vallée du Gountou –Yena ».
En poursuivant ses explications, Allassane Ado définit que « Gountou –Yena est un affluent du fleuve Niger, son bassin versant a une superficie de 61 et demi de kilomètre carrés qui repose sur 53 quartiers des 90 quartiers de la ville de Niamey et quatre sont déjà inondés sur les 53 ».
Les recherches du doctorant reposent sur la gestion des inondations en milieu urbain. Ainsi pour le cas de Sonuci, il y a plusieurs années « on ne savait pas que le quartier de Sonuci allait être inondé » dit-il. Le problème a débuté au niveau de « Dar es Salam où l’impact est ancien et moins ressenti. Mais à Sonuci, l’impact est nouveau et ressenti » a-t-il constaté. Le problème d’inondation date de longtemps dans certains quartiers de la ville. Mais à Sonuci, le problème est récent.
D’après leurs recherches, vers Sonuci « 42 % de l’échantillon enquêté pense que le problème est survenu entre 2015 et 2016 contre 44 % à Dar es salam » a-t-il souligné. Ainsi toujours dans ses recherches, Allassane Ado découvre dans la zone de Sonuci, l’existence des 10 premiers mètres de profondeur, une « couche argileuse qui va freiner l’infiltration des eaux à aller plus en profondeur. Ce qui constitue, compte tenu de la géomorphologie, une inondation à la surface » a-t-il relevé.
Ainsi des plans d’eau partout qui servent de dépotoirs des ordures ménagères, une défécation à l’air libre d’où « un lieu propice pour le développement et la propagation des maladies d’origine hydrique et à transmission vectorielle telles que : la bilharziose, la conjonctive, les choleras, le paludisme… etc » note le doctorant. Les eaux des fosses septiques, qui se jettent dans la nappe phréatique, contribuent à la pollution des eaux souterraines. Beaucoup d’habitants sont obligés d’abandonner le quartier de Sonuci parce qu’ils étaient carrément encerclés par les eaux dans leurs concessions. Les quelques rares qui sont restés rencontrent d’énormes difficultés « manque des voies de passage, pas d’infrastructures d’assainissement et sont surtout exposés aux différentes sortes de maladies…» a-t-il confirmé.
En plus du problème sanitaire, la population est confrontée à d’autres problèmes d’aspect économique parce que celle-ci, une fois atteinte par l’une de ces maladies aura beaucoup « à dépenser pour se soigner » expliquait-il.
Le doctorant renseignait qu’ils sont sur des travaux de recherche qu’ils vont soumettre aux décideurs. « Nous sommes en train d’établir une carte physiométrique de la nappe phréatique dans la ville de Niamey, qu’on va superposer au Model Numérique de Terrain ( MNT ). Ceci nous permettra de prédire dans l’avenir, les secteurs qui seront inondés et dans l’espoir de mettre fin un jour à cette menace des inondations » conclut Alassane Ado Halidou doctorant en Hydrologie à l’Université Abdou Moumouni de Niamey, en collaboration avec l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD).
Interview llassane Ado Halidou, doctorant en Hydrologie à l’Université Abdou Moumouni de Niamey