Les Assises Nationales du Niger ont officiellement débuté ce samedi 15 février 2025 au Centre International de Conférence Mahatma Ghandi de Niamey. Placées sous la présidence du Général de brigade Abdourahamane Tiani, Chef de l’État et Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), ces assises visent à définir les principes fondamentaux de la transition, établir une feuille de route et formuler des recommandations stratégiques pour l’avenir du pays.
Le Discours d’ouverture du Général de brigade Abdourahamane Tiani
Dans son discours d’ouverture, le Général Tiani a rappelé l’importance de ces assises dans le cadre de la refondation du Niger. Il a souligné les défis auxquels le pays a été confronté depuis le 26 juillet 2023, date de l’avènement du CNSP, notamment les sanctions de la CEDEAO et les tensions internationales. « Notre pays fait face à l’animosité de certaines puissances occidentales et leurs complices africains et locaux. Les Nigériens vivent encore dans leur chair l’embargo lâche, inhumain et illégal, ainsi que la menace d’une guerre militaire contre leur pays », a-t-il déclaré.
Il a insisté sur l’engagement du peuple nigérien à défendre sa souveraineté, tout en mettant en avant la nécessité de poser les bases d’un État fort et indépendant : « Elles (Les assises) doivent être un moment d’échange constructif qui va fédérer tous les Nigériens pour l’atteinte de nos objectifs communs d’unité nationale, de cohésion sociale, de justice sociale, de paix, de sécurité et de progrès socio-économique ».
Un engagement collectif pour la refondation
Le Dr Mamoudou Harouna Djingarey, le président de la Commission chargée de la conduite des travaux des Assises Nationales, a également pris la parole, insistant sur la nécessité de tirer des leçons dans l’histoire récente du Niger en la matière pour éviter les erreurs du passé : « Nous devons tirer les leçons de la Conférence nationale souveraine de 1991 afin d’éviter les erreurs du passé ». Il a rappelé que ces assises doivent poser les fondations d’un Niger souverain et stable, s’appuyant sur des institutions fortes, une bonne gouvernance et une justice équitable.
Des attentes multiples et une implication des participants
Les 716 participants aux assises, issus de diverses régions et couches socioprofessionnelles, sont appelés à proposer un avant-projet de la Charte de la Transition et à formuler des recommandations précises. Parmi eux, des universitaires, des membres de la société civile, des représentants de la jeunesse, des associations féminines, etc.
Toutefois, les partis politiques, qui ont été suspendus à la suite du coup d’État du 26 juillet 2023, n’ont pas de représentation au sein de cette Commission.
La contribution des chercheurs et universitaires
Dr Nouhou Zangorzo, enseignant-chercheur à l’Université Dan Dicko Dan Kolodo de Maradi, a mis en avant le rôle des scientifiques dans ces assises : « Notre contribution, c’est d’apporter des éclairages par rapport aux différentes propositions qui vont être faites, pour prendre des décisions éclairées, basées sur des connaissances scientifiques ». Il a également mentionné l’élaboration de documents stratégiques sur la recherche et l’enseignement supérieur, qui pourraient guider la future politique éducative du Niger.
La voix des femmes : entre sécurité et inclusion
Les associations féminines sont également représentées. Hadjia Bintou, participante de la région de Diffa, au nom des associations féminines, a exprimé les préoccupations des femmes, en particulier sur les questions sécuritaires : « Notre doléance, c’est surtout par rapport à la question sécuritaire », en effet Bintou vient d’une région marquée par l’insécurité avec notamment les multiples exactions de la secte Bocko Haram. Elle a insisté sur la l’importance de prendre en compte les réalités des femmes dans les décisions à venir.
Mme Noma Hapsatou Inoussa, présidente des ONG et associations féminines Kassaye, a pour sa part plaidé pour une meilleure représentativité des femmes dans le processus de transition et espère la prise en compte des droits et devoirs des femmes dans cette refondation du Niger.
L’engagement de la jeunesse pour l’emploi et la paix
Les jeunes sont également présents avec un agenda clair. Yacouba Labo, rapporteur du Conseil régional de la jeunesse de la région de Maradi, s’est prononcé en faveur d’une politique d’emploi adaptée. Il soutient que la vision des jeunes de Maradi, c’est l’employabilité et la création d’un fonds pour financer les petites entreprises. Sans quoi, selon lui, il ne peut y avoir de développement durable. Il a aussi mis en avant le rôle des jeunes dans la consolidation de la paix et la stabilité du pays.
Mohamadou Moctar Rachid, qui est secrétaire général adjoint de l’USN, a quant à lui souligné l’importance d’une éducation patriotique et adaptée aux réalités nationales : « Il faudrait que dans nos écoles, il y ait du patriotisme… » qui se traduit par exemple par l’enseignement de l’histoire du Niger et de l’Afrique dans les établissements scolaires.
La diaspora veut une meilleure intégration
Le professeur Kabirou Oumarou, représentant de la diaspora nigérienne en Europe, souhaite une meilleure prise en compte des Nigériens vivant à l’étranger : « Nous voudrions que la diaspora soit matérialisée comme la 9e région du Niger, comme l’indique la Constitution.» Ce qui, pour lui, n’est jusqu’ici pas le cas. Il a également souligner l’importance d’une gestion souveraine des ressources naturelles.
L’approche diplomatique et la vision de l’indépendance
Moutari Ousmane, représentant de l’Association des anciens ambassadeurs et consuls du Niger, a rappelé la vision des diplomates dans l’affirmation de la souveraineté du Niger : « Nous nous sommes battus pour affirmer la souveraineté du Niger et exiger le respect de ses droits au niveau international ». Pour lui, il faut placer l’intérêt national au-dessus des considérations partisanes.
Ces assises nationales sont perçues par les différents participants comme une opportunité historique de redéfinir l’avenir du Niger. Les attentes sont nombreuses et touchent à plusieurs domaines : la gouvernance, la sécurité, l’éducation, l’économie, la participation citoyenne, l’autonomisation des femmes et des jeunes, etc. Toutefois, un point commun émerge des différents participants : la volonté de tourner la page des crises et des instabilités passées pour bâtir un Niger fort, juste et prospère.