Cela fait un an que la pandémie du coronavirus est apparue et que des millions de personnes ont été confinées et continuent de l’être dans le monde. Pour le cas du Niger, lors de la première vague de cette pandémie, le gouvernement avait décrété, du 19 mars au 29 mai 2020, la fermeture des bars, maquis et autres lieux de loisirs nocturnes.
Ce premier confinement a impacté négativement les artistes nigériens, notamment les musiciens. Selon Omar Salifou, le président de l’ANACIMM (association nigérienne des auteurs compositeurs et interprètes des métiers de la musique), cette catégorie d’artistes, dont le nombre est estimé à plus de 10 000, se compose des musiciens urbains (les rappeurs), des musiciens traditionnels jouant avec les instruments traditionnels comme la calebasse ou le molo, des musiciens néo-traditionnels (les Denké-denké), des musiciens modernes (les orchestres) et des musiciens du monde.
La covid-19 a mis en péril l’emploi de ces milliers de personnes. Selon Omar Salifou, le président de l’ANACIMM, région de Niamey, « il y a des orchestres qui ont été disloqués, des bars où les contrats ont été résiliés avec les orchestres… ». Et il poursuit : « Nous ne sommes même pas encore sortis de la première vague que voilà la deuxième vague ». Les tournées nationales et internationales, les prestations dans les bars, les maquis, les mariages ont été annulés ou suspendus. « Il n’y a plus d’activités, plus d’animations culturelles », dit-il. Et c’est aussi valable dans la capitale Niamey qu’à l’intérieur du pays.
L’impact a d’ailleurs dépassé le cadre professionnel pour s’infiltrer dans le cadre privé. « Je connais beaucoup de familles d’artistes qui sont disloquées », confie Almeida Issoufou, le trésorier de l’ANACIMM, qui estime que le manque à gagner, rien que pour le premier mois de confinement (mi-mars–mi-avril 2020), pour les artistes musiciens les plus actifs de Niamey, est de plus de 173 millions de francs CFA.
Quelles mesures pour accompagner ces artistes musiciens ?
L’ANACIMM interpelle le gouvernement sur la difficile situation dans laquelle vivent ces musiciens en ces temps de Covid-19. Déjà, la situation avant Covid était précaire pour beaucoup d’entre eux. Avec les confinements, c’est des coups plus durs encore qu’ils encaissent. Selon Almeida Issoufou, des artistes ont abandonné la musique et ont été obligés de vendre leurs matériels ou leurs parcelles pour vivre.
Sur le plan de la performance, ces confinements font perdre la main aux artistes qui ne peuvent plus se produire sur scène devant un public : « on perd carrément la main ! Si ce n’est pas la main, on perd carrément le bras… », dit avec humeur Ameilda Issoufou, qui poursuit plus sérieusement : « Si vous perdez la musique un jour, elle vous perd 1 an ».
Les artistes musiciens attendent beaucoup du gouvernement qu’il aille plus loin dans son soutien, en complétant les vivres distribués aux artistes par une aide financière, à l’image de ce qui se fait au Sénégal ou au Burkina Faso.
En effet, les artistes de Niamey, ont reçu 2 sacs de mil ou de maïs (de 25 kg chacun) par personne. Cette distribution a concerné uniquement les artistes, tous bords confondus, de la capitale. Ceux de l’intérieur du pays n’ont pas bénéficié de cette aide. Pour les autorités, la raison qui justifie cette exclusion réside dans le fait que seule Niamey a été confiné, pas le reste du pays. Pour le trésorier de l’ANACIMM, cette aide céréalière était bien venue mais « ce n’est pas arrivé » !
Des alternatives possibles ?
Il devient primordial de soutenir les artistes, car ils sont « les témoins de leur époque », comme le souligne Omar Salifou, le président de l’ANACIMM. Le trésorier de l’ANACIMM, Ameilda Issoufou, rappelle solennellement : « Nous sommes des acteurs culturels. Nous portons le flambeau de ce pays, que cela soit à l’intérieur ou à l’extérieur du Niger… Nous avons choisi de faire la promotion de la culture. Et la culture, c’est quoi ? C’est l’identité d’un pays. Nous demandons à nos gouvernants de voir, par rapport aux mesures barrières, comment permettre aux artistes de faire des spectacles, ne serait-ce qu’en limitant les entrées dans les salles ».
L’ANACIMM évoque la grande mobilisation des artistes musiciens dans la lutte contre la Covid-19 à travers des chansons qui ont touché tout le Niger. Son président suggère qu’ « aujourd’hui, le gouvernement peut utiliser ces artistes. Peut dire, bon, on vous a enfermé, venez, vous allez passer dans la sensibilisation ».
L’alternative c’est l’espoir et la confiance qu’ont ces artistes en leur gouvernement.
Iinterview Ameilda Issoufou, trésorier de l’ANACIMM
Interview Omar Salifou, président de l’ANACIMM