Sauvegarde des autruches à cou rouge de Kellé

L'autruche d'Afrique du Nord (Struthio c. camelus) ou autruche à cou rouge est l'une des quatre sous-espèces d'autruches existantes. L’espace sahélo-saharienne est une zone de prédilection pour ce grand oiseau.…
Sauvegarde des autruches à cou rouge de Kellé
Une autruche femelle et ses petits / CC- sgustin78 / Source : flickr.com

L’autruche d’Afrique du Nord (Struthio c. camelus) ou autruche à cou rouge est l’une des quatre sous-espèces d’autruches existantes. L’espace sahélo-saharienne est une zone de prédilection pour ce grand oiseau. Il y a un siècle, cette race d’autruches était localisée dans près de 18 pays limitrophes du Sahel et du Sahara. Aujourd’hui, leur espace vital est réduit à 6 pays.

Au Niger, la zone de Kéllé, dans le département de Gouré, région de Zinder, est la zone de prédilection de l’autruche à cou rouge. La période de sécheresse qu’a connu le pays dans les années 1970-1980 ainsi que la pression anthropique à Kellé, jumelée à la pratique de la chasse a eu raison de cette faune. Une faune en voie de disparition. Jusqu’en 1990, la RNNAT (Réserve Naturelle Nationale de l’Aïr et du Ténéré) abritait la dernière population sauvage importante d’autruches.

La perte du dernier mâle en 2004 localisé dans la Réserve Naturelle Nationale de l’Air et Ténéré a entrainé la disparition de l’autruche à cou rouge dans ce milieu naturel.

La gestion du site de Kéllé par Maïmounatou Ibrahim Mamadou

Ibrahim Mamadou Maïmounatou est une inconditionnelle passionnée des autruches. D’ailleurs, dès son bas âge, elle aimait visiter le centre de Kéllé et aujourd’hui, elle est la gestionnaire de ce site. De ses années de licence et de master 2 à l’université, elle a effectué deux stages au sein du site de Kellé sur ces autruches. Lors de son deuxième passage sur le site, Maïmounatou a fait « une proposition de gestion » compte tenu de la situation déplorable du site a-t-elle expliqué au Studio Kalangou. Sa proposition acceptée, Ibrahim Mamadou Maïmounatou est aujourd’hui la responsable dudit site.

Selon elle, la bonne gouvernance du site de Kéllé a permis le retour des partenaires puisque « au début, il n’y avait pas d’éclosion, il n y a que des pertes… Maintenant ils sont revenus jusqu’à faire des installations, qui sont de grande valeur, pour accélérer le projet ». Les travaux d’installation du matériel d’équipement pour le centre ont propulsé l’essor économique de la localité et surtout dans le cadre des travaux champêtres, l’alimentation des autruches est directement achetée sur place. La population n’a pas à se déplacer pour aller les vendre ailleurs. La population de Kéllé tire un grand avantage en termes d’économie, également « chaque fois qu’il y a des travaux qui nécessitent une main d’œuvre, on utilise la population » locale a expliqué Ibrahim Mamadou Maïmounatou.

Les difficultés auxquelles fait face le site des autruches de Kellé sont surtout d’ordre sécuritaire et sanitaire explique la gestionnaire « le manque de clôture et le manque de vétérinaire ». L’absence de clôture ne permet pas une surveillance et un contrôle efficaces des entrées et des sorties des personnes qui pénètrent dans ce périmètre. Aussi, le manque de vétérinaires est un vrai casse-tête, quand un individu est malade « on le perd automatiquement » nous confie la gestionnaire du site. Ici, le choix du traitement est problématique pour les experts eux-mêmes, qui sont partagés entre la médecine moderne et la médecine traditionnelle, a poursuivi Ibrahim Mamadou Maïmounatou.

Dans leurs travaux de recherche portant sur la « Restauration écologique de la population de l’autruche d’Afrique du Nord (Struthio camelus camelus (Linnaeus, 1858)) dans le site de Kellé (Zinder/Niger) : Analyse des forces et faiblesses. » disponible ici. IBRAHIM MAMADOU, RABEIL Thomas, AMADOU OUMANI Abdoulaye, RABIOU Habou et MAHAMANE Ali ont relevé dans leur conclusion que « À travers la perception paysanne, la dimension du site et ses caractéristiques environnementales et écologiques, on peut affirmer avec certitude que le site est l’endroit idéal pour la reproduction des individus d’autruches en vue de leur réintroduction à l’état naturel, car toutes les faiblesses ou les problèmes visibles peuvent être remédiés ».

Aussi, le dénombrement de 79 espèces végétales sur ce site, constituant une valeur ajoutée à cette étude, est un indicateur propice à l’élevage de l’autruche à cou rouge.

Néanmoins estiment-ils qu’ « Une étude plus approfondie sur la faune, la quantification de la disponibilité alimentaire s’avère nécessaire pour compléter l’étude. De même l’évaluation de la disponibilité alimentaire des espèces en termes de biomasse et aussi à travers des analyses de fèces déterminant celles appétées. ».

L’appui du Sahara Conservation Fund

Lors de sa création en 2004, Sahara Conservation Fund (SCF) ambitionne de sauvegarder des espèces d’animaux en voie d’extinction. Sa mission est « de conserver la faune sauvage, les habitats et autres ressources naturelles du Sahara et de ses prairies sahéliennes limitrophes ».

Au Niger, c’est en novembre 2008 que l’organisation a commencé à mettre en pratique son expertise en travaillant avec la Coopérative d’Exploitation des Ressources Naturelles du Koutous (CERNK). Ce qui témoigne de sa collaboration avec le Niger dans la sauvegarde de l’autruche à cou rouge.

C’est en 2011 que l’Etat du Niger confie la gestion du site à SCF qui, assure « pleinement le développement des ressources humaines, de l’alimentation et des infrastructures nécessaires à son fonctionnement ». Aussi, une stratégie nationale de conservation en vue d’augmenter « les chances d’une réintroduction réussie (et en particulier pour encourager l’échange d’autruches et d’œufs entre les différents sites afin d’augmenter le pool génétique). Dans le cadre de cette stratégie nationale, le SCF soutient également les autres sites pour ce qui est de la nourriture, des soins et de la surveillance des personnes » peut-on lire sur le site SCF disponible ici.

En sommes, SCF a réalisé de nouvelles installations pour augmenter le nombre d’autruches à cou rouge nées en captivité au centre d’élevage de Kellé. Une écloserie ainsi qu’une unité d’incubation à énergie solaire ; ce qui permet de résorber les besoins en énergie et en eau du centre du fait de son éloignement de la commune de Kellé. Le système satellitaire mise en place permet aux « ingénieurs basés aux États-Unis de se connecter à Internet et de surveiller les performances des conteneurs. » abritant l’écloserie.